«Né d'une femme» : c'est sur le sens et l'importance de ces paroles de saint Paul (Galates 4, 4) que le cardinal Raniero Cantalamessa a développé sa troisième prédication de l'Avent, ce vendredi matin dans la salle Paul VI, en présence du Pape François. L’occasion également pour lui de réfléchir au rôle de Marie dans l'Église, à la lumière de la Parole de Dieu et de la tradition patristique.
Le prédicateur de la Maison pontificale a notamment souligné que dans la Bible, l'expression «né d'une femme» indique l'appartenance à la condition humaine, faite de faiblesse et de mortalité. «Il suffit d'essayer de supprimer ces trois mots du texte pour se rendre compte de leur importance», a souligné le frère mineur capucin. En effet, il se demande ce que serait le Christ sans eux : «une apparition céleste, désincarnée». Même l'ange Gabriel «fut envoyé» par Dieu, mais pour «retourner au ciel comme il en était descendu». La Vierge, par contre, est celle qui a «ancré» le Fils de Dieu à l'humanité et à l'histoire pour toujours. Ainsi, «dans tout l'univers, Marie est la seule à pouvoir s'adresser à Jésus avec les mêmes mots que le Père céleste : “Tu es mon Fils, je t'ai engendré”».
Développant plus profondément l'expression «né d’une femme», le cardinal Cantalamessa note que saint Irénée la lit à la lumière de Genèse 3, 15 : «Je mettrai une hostilité entre toi et la femme». Marie apparaît comme «la femme qui récapitule Ève, la mère de tous les vivants». «Elle n'est pas une apparition marginale qui entre en scène pour ensuite disparaître dans la nature. Elle est l'aboutissement d'une tradition biblique qui traverse toute la Bible d'un bout à l'autre», qui commence avec la femme «fille de Sion», qui est la «personnification de tout le peuple d’Israël», et se termine avec la femme «revêtue de soleil, avec la lune sous les pieds» de l’Apocalypse (12,1) qui représente l’Église.
De plus, «femme» est «le terme utilisé par Jésus pour s'adresser à sa mère à Cana et sous la croix». Il est «impossible, dans la pensée de Jean, de ne pas voir un lien entre les deux femmes» : la femme symbolique qui «est l'Église et la femme réelle qui est Marie». Ce lien est reconnu dans Lumen Gentium qui, précisément pour cette raison, «traite de Marie au sein de la Constitution sur l'Église».
À cet égard, le prédicateur a évoqué la question de «la dignité de la femme», notant que «beaucoup a été fait ces derniers temps pour accroître la présence des femmes dans les sphères décisionnelles de l'Église et que davantage, peut-être, reste à faire». Mais il a surtout insisté sur la dimension ecclésiale de la déclaration de Paul : «Si, dans l'Écriture, la femme signifie l'Église dans son sens le plus large», a-t-il souligné.
Pour le cardinal Cantalamessa, «nous devons tout faire» pour que l'Église ne devienne pas un «château compliqué et encombré» qui empêche le message du Christ d'en «sortir libre et joyeux». Nous savons, a-t-il reconnu, «quels sont les murs de séparation» qui peuvent retenir le messager. «Il s'agit tout d'abord des murs qui séparent les différentes Églises chrétiennes les unes des autres, puis de l'excès de bureaucratie, des vestiges d’un cérémonial devenu insignifiant : des oripeaux, des lois et des controverses passées, qui ne sont plus que des débris». Mais inévitablement, «le moment arrive où l'on se rend compte que toutes ces adaptations ne répondent plus aux besoins actuels, voire qu'elles constituent un obstacle». C'est pourquoi, a déclaré le cardinal, «nous devons avoir le courage de les abattre et de ramener l'édifice à la simplicité et à la linéarité de ses origines, en vue d’un nouvel usage».